Le management hybride, partage d’expériences et mantras
L’événement était animé par Jean-Paul Erhard, Managing partner de Peoplesphere, le magazine dédié au « people management » et aimablement sketchnoté par Stéphanie Lefèvre.
Le management hybride, une tendance durable
On ne va pas épiloguer. La crise sanitaire que nous traversons a rebattu bien des cartes et réorganisé le travail autant que nos modes de collaboration. Le retour au bureau en mode « hybride » de cet été a également marqué un nouveau tournant. Avec son lot de défis et de questionnements pour les responsables d’équipe. Cette tendance du travail hybride semble s’inscrire dans la durée : partout dans le monde, de nombreux collaborateurs sont séduits par le nouvel équilibre “travail à domicile ou nomade et travail au bureau”. Dans ce contexte:
- Comment rebondir en tant que manager ?
- Comment donner du sens au retour en présentiel ?
- Quelle histoire construire pour vos équipes ?
Nouveau normal, nouvelle posture pour le manager
Le nouveau normal pose d’emblée la question cruciale du rééquilibrage, et qui dit rééquilibrage, dit nouvelle posture pour le manager. On parle de cette posture qui vise à la fois à équilibrer les champs de tension dans nos organisations et à ménager un espace suffisant pour le développement humain. Si nous avons encore des certitudes, les voici : nous ne reviendrons pas en arrière, c’est une chose ; deuxièmement, nous avons démontré une belle capacité à rebondir. La mission dévolue au management hybride est donc de regarder vers l’avant et d’entretenir notre esprit de résilience. Pour cela, les compétences d’encadrement et de leadership doivent s’actualiser, s’augmenter, gagner en agilité. Mais c’est aussi toutes les strates de la culture d’organisations qui sont impactées et impliquées.
Pour Isabelle Küntziger, directrice générale de l’EAP, nous sommes bien là “au cœur des préoccupations de l’ensemble des chefs d’équipe en Région Wallonne et en Fédération Wallonie-Bruxelles”.
L’EAP : de plain-pied dans le management hybride
L’EAP s’aligne parfaitement dans cette perspective, pour accompagner les organisations dans leur mutation hybride. Avec des modalités d’apprentissage judicieuses et renouvelées, avec une offre de formation qui répond au besoin criant en matière d’intelligence émotionnelle et relationnelle. Autant de dispositifs impérieux pour renforcer la nouvelle posture de manager.
Nouveau normal, nouvelle posture, nouvelle culture. Nous devons maintenant nous engager sur le temps long, renforcer nos acquis, prendre le temps de les ancrer durablement et sereinement dans la culture managériale. L’opportunité est belle, nous dit encore Isabelle Küntziger, car tout le monde doit apprendre en même temps et ensemble, tout le monde doit se réinventer en cocréation avec les autres. Le changement de posture ne concerne donc pas uniquement les managers, mais bien l’ensemble des équipes. Qu’on se le dise : l’apprentissage de l’hybridation sera collectif ou ne sera pas.
Les 3 mantras du management hybride
Dans l’hindouisme et le bouddhisme, le mantra est une formule sacrée au pouvoir incantatoire. Dans nos usages, on peut définir le mantra comme une phrase « ancrage » : qui nous aide à garder l’esprit concentré sur ce qu’elle signifie. Quand on mène une mission de management en mode hybride, il est important de s’imprégner – et de garder l’imprégnation – du sens de 3 facteurs clés de réussite – ou mantras : cultiver le bien-être, trouver l’équilibre et gérer l’imprévu. C’est la voie que nous proposent de suivre les formateurs et formatrices aguerris de l’EAP.
Cultiver le bien-être – par Cédric Danse
C’est le mantra de Cédric Danse, maître de conférence à l’université de Liège et psychosociologue.
Si vous lui demandez comment relever les défis du management hybride à l’aune des risques psychosociaux, Cédric vous répondra en termes de continuum. Car oui, pour mettre à profit les avantages acquis des nouvelles modalités du télétravail, il faut mettre l’organisation hybride dans la balance des bénéfices et des risques. Il identifie ainsi 3 continuums possibles pour penser les risques psychosociaux liés à l’organisation hybride :
- distance-présence
- individuel-collectif
- contrôle-laisser agir
Comprenez que la rupture de ces continuums peut mettre à mal la réussite d’un modèle hybride, en contrevenant à la fois à la qualité du travail et au bien-être des équipes.
Quelques exemples parlants de rupture de continuum :
- distance-présence : la rupture de ce continuum peut mener, dans le trop distanciel, à l’isolement social et l’invisibilité ; et dans le trop présentiel, au risque d’accaparer l’attention au détriment d’autrui.
- individuel-collectif : la rupture de ce continuum peut mener pour les managers, dans le trop individuel, à une surcharge croissante lorsqu’on doit gérer des demandes toujours plus personnalisées ; et dans le trop collectif, à une difficulté de consolider l’intelligence de groupe.
- contrôle-laisser agir : la rupture de ce continuum peut mener, dans trop de contrôle, à une perte de sens quand les buts du système prennent le pas sur les buts de la mission ; et, dans un laisser agir trop laxiste, à une absence d’alignement sur les objectifs.
Le bien-être est donc avant tout une histoire de pôles à (ré)concilier. Comment ? Voici quelques effets correcteurs éprouvés, pour préserver les continuums :
- distance-présence : limiter le temps de télétravail, favoriser les moments qui mobilisent la présence à soi, aux autres et aux projets
- individuel-collectif : réguler et ritualiser les temps collectifs présentiels, soutenir le maintien d’un réseau plus informel, permettre à chaque collaborateur un entretien régulier avec son manager
- contrôle-laisser agir : imposer un temps de travail collectif présentiel et donner le choix d’un temps de télétravail, porter le contrôle sur la redevabilité (résultats en sortie) et non sur l’organisation de la tâche, identifier où apporter son soutien à ses collaborateurs
En somme, la démonstration de Cédric est claire : l’hybride n’est pas et ne doit pas être un mélange ambigu, à géométrie variable, mais bien une culture à construire, à articuler, à partager – de manière agile autant que cadrée.
Trouver l’équilibre – par Françoise Marneffe
C’est le mantra de Françoise Marneffe, formatrice et coach chez Evoluo.
L’équilibre est primordial pour les équipes et les collaborateurs, mais aussi pour les managers et les responsables d’entité – qui trop souvent s’oublient sur cette question. Ça, c’est un premier constat. Le deuxième constat, c’est que si la crise a bien sûr été brutale, elle a en fait eu pour principal effet d’exacerber des difficultés auxquelles on était déjà confrontés, sans en prendre toute la mesure. La rupture d’équilibre a fait le reste.
Le pire ennemi de l’équilibre, Françoise nous le rappelle, s’appelle VUCA :
- Quand les choses sont Volatiles, nous avons besoin de vision.
- Quand les choses sont Incertaines (Uncertainty), nous avons besoin de compréhension.
- Quand les choses sont Complexes, nous avons besoin de clarification.
- Quand les choses sont Ambiguës, nous avons besoin d’agilité.
L’objectif du rééquilibrage est donc double : mieux comprendre les situations et mieux prédire les résultats de nos actions. Pour cela, en tant que manager, il faut avoir plusieurs cordes à son arc, plusieurs casquettes, plusieurs postures : celle de manager, oui, mais aussi celle de coach, celle d’entrepreneur, celle de leader. C’est ce que Robert Quinn appelle des rôles en tension : en tension entre le stable et le flexible, en tension entre ce qui se passe à l’intérieur de l’organisation et ce qui se passe en dehors. Ce manager augmenté par l’hybridation est celui qui assure l’efficacité, entraîne des équipes, adapte de manière créative, donne une orientation motivante.
Mission impossible ? Presque. Mais une solution est donnée par les 4 leviers de motivation de Decy et Ryan. Ces leviers décentrent dans le même temps la responsabilité de l’équilibre à l’ensemble des membres d’équipe et plus uniquement comme étant du seul ressort du manager. François utilise l’image de la maïzena : le manager est finalement celui qui fait prendre la sauce. Côté ingrédients, donc, on trouve : un sentiment de compétence, des relations positives, de l’autonomie, du sens. La confiance partagée sert de liant, comme une bonne communication.
Gérer l’imprévu – par Charles Van Haverbeke
C’est le mantra de Charles Van Haverbeke, formateur et coach chez Caminos.
L’imprévu, c’est un peu le mode de fonctionnement du nouveau normal et du management hybride. Que faire alors, quand les turbulences menacent la réussite de notre plan d’action ? Comme Charles le rappelle, les 3 clés de la réussite de tout plan d’action sont :
- la formation
- la communication
- l’accompagnement
Quand un ou plusieurs de ces 3 axes se retrouve dans la tourmente, c’est le bateau qui coule.
La bonne nouvelle, ce que ce n’est pas forcément une fatalité. On peut aussi traverser la tourmente et arriver à bon port. Comment ? Charles nous donne la feuille de route : suivre une vision non prédictive et plus circulaire de notre plan d’action. Car l’écueil de l’approche prédictive, c’est qu’à la moindre contrariété, toutes nos belles prévisions s’écroulent et c’est le statut quo : on n’atteint pas les objectifs fixés, voire on produit l’effet inverse avec son lot de frustration, de démotivation et de résistance au changement. Ce sont là les symptômes que tout ce qu’on avait mis en œuvre n’a pas pu s’ajuster quand c’était nécessaire.
Au contraire, avec une vision non prédictive, on sait à l’avance qu’il va y avoir des turbulences et on s’y prépare. À bord du bateau, on met au point un système de recueil d’informations, c’est notre radar : c’est lui qui nous donne des informations sur les turbulences et des clés d’interprétation. On est alors en mesure de faire les adaptations nécessaires pour contourner les obstacles et de faire fructifier l’intelligence collective.
Parmi les outils de recueil d’informations :
- ADKAR : Awareness (sens), Desire (bénéfices), Knowledge (informations), Abilities (compétences), Reinforcement (reconnaissance)
- ICAP : Information, Compréhension, Adhésion, Participation
- 3 QUOI : Pourquoi (sens), Quoi (modalités), Pour Quoi (bénéfices)
Pour Charles, il faut avant tout et surtout se donner les moyens humains. La mise en place d’une task force dédiée est indispensable derrière le gouvernail, avec une agilité suffisante. Comprenez : une autonomie de travail, une bonne résistance au stress et des ressources. La boîte à outils indispensable du management hybride.
Alors, qu’allez-vous apprendre aujourd’hui ?
Retrouvez le sketchnoting de cette belle journée.