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Le co-développement professionnel : apprendre les uns des autres

Le co-développement professionnel : apprendre les uns des autres

Le co-développement professionnel : apprendre les uns des autres

Cette démarche expérientielle d’un nouveau genre est originaire du Québec. Elle est  de plus en plus utilisée chez nous avec des retours très satisfaisants des participants. À ne pas confondre avec l’intervision, le co-développement professionnel s’appuie sur un processus très cadré : il structure la parole, l’écoute et la réflexion tout en incitant à l’action grâce à l’émergence et l’expérimentation de solutions créatives. Chaque participant peut ainsi, à son rythme, monter en compétences grâce à la multiplication des points de vue systématisée, l’émulation et la mise en intelligence collective.

Le co-développement en pratique

Mais comment se déroule concrètement un processus de co-développement ? À chacune des séances, un des participants devient le « client » du jour : il expose une situation de sa pratique qui lui pose question alors que les autres participants interviennent à titre de « consultants » pour résoudre sa problématique.

On distingue 6 étapes dans un processus de consultation. Le respect de celles-ci est capital et l’animateur en est le garant rigoureux :

  1. Exposé de la problématique : un participant, qui sera appelé le client, expose une situation ou une difficulté qu’il rencontre dans sa pratique professionnelle.
  2. Clarification: sous forme de questions, les consultants s’assurent de la bonne compréhension de la problématique. Le client répond sans entrer ni dans un débat ni dans la justification.
  3. Contrat de consultation : le client précise sa demande finale au groupe. Il arrive régulièrement que les questions posées à l’étape 2 aident le client à voir le problème sous un jour nouveau, l’amenant à modifier sa demande initiale. Celle-ci est alors scellée dans un “contrat de consultation” et elle seule fera l’objet de la réflexion du groupe.
  4. Consultation – exploration : les consultants livrent leurs impressions, suggestions ou partagent leurs expériences. C’est à ce moment précis que toute la force de l’intelligence collective entre en œuvre.
  5. Synthèse et plan d’action : le client indique ce qu’il a retenu des échanges et partage le plan des actions concrètes qu’il s’engage à essayer à court terme, d’ici la séance suivante.
  6. Apprentissage et régulation : c’est un moment où chacun – client et consultants – partage ses apprentissages, prend le recul et évalue la séance. C’est l’un des avantages d’une séance de codéveloppement : tout le monde apprend !

Un processus de co-développement s’étale généralement sur une période de 6 à 12 mois, au rythme d’une séance par mois. En effet, ce n’est que lorsque ses réflexions conjointes s’inscrivent dans la durée que le groupe peut pleinement bénéficier des expertises de chacun.

Échanger avec les autres sur ses expériences permet des apprentissages impossibles autrement.
Anne Rysenaer

Le co-développement et l’intelligence collective : l’administration en phase exploratrice

Le premier projet pilote de co-développement a été mis en place en avril 2015 au MFWB. Cette approche pédagogique est très appréciée par nos responsables pédagogiques, comme nous l’explique Anne Rysenaer, responsable à l’EAP des nouvelles pédagogies.

Quels sont pour vous les objectifs de mettre en place cette méthodologie ?

Anne Rysenaer :
Le co-développement est un processus formatif qui mise sur les interactions entre les participants. Chacun avec la conviction qu’il est possible d’apprendre les uns des autres. Sans cette conviction et l’implication de chacun, cela ne peut pas fonctionner. Ce mode structuré, cultivé par une « intelligence collective », a pour objectif d’inciter à l’action. Généralement, les participants à un groupe de co-développement professionnel poursuivent plusieurs des objectifs individuels suivants :

  • Apprendre à être plus efficaces en s’exerçant à de nouvelles façons de penser, d’agir, dans leur pratique actuelle.
  • S’obliger à prendre systématiquement un temps de réflexion sur leur pratique professionnelle – rappelons que le groupe se réunit à intervalles réguliers sur une durée de 6 mois à 1 an.
  • Être intégrés dans un groupe d’appartenance professionnelle où règnent confiance et entraide.
  • Consolider leur identité professionnelle en comparant leur pratique à celle des autres.
  • Apprendre à aider et à être aidés.

Quels en sont les bénéfices pour les formateurs et les formés ?

Anne Rysenaer :
Apprendre avec le co-développement, c’est apprendre « autrement ». Il n’y a pas d’un côté un formateur porteur et dépositaire d’un savoir, un sachant qui apporte « la théorie et les cas à traiter » et de l’autre, les apprenants. Il s’agit de transformer ce que l’on sait déjà grâce aux interactions entre participants et d’élargir ainsi les capacités d’action et de réflexion de chaque membre du groupe.

Le codéveloppement est-il fait pour moi ?

Pour le savoir, répondez à ces quelques questions !

  1. Êtes-vous motivé à vous améliorer comme praticien, à devenir plus compétent ?
  2. Êtes-vous convaincu qu’il est possible d’apprendre les uns des autres, à travers une approche de mise en commun des savoirs et des idées de chacun ?
  3. Êtes-vous ouvert à ce que l’on vous pose des questions sur votre pratique et à entendre d’autres façons de procéder ?
  4. Êtes-vous prêt à vous montrer tel que vous êtes c.-à-d. à partager vos compétences et à explorer les niveaux moins techniques de celles-ci (la peur, la motivation, le plaisir,…) ?
  5. Êtes-vous prêt à apporter aux autres vos compétences et expériences au service des besoins qu’ils expriment en lien avec leur pratique professionnelle et ce, sans jugement ?
  6. Êtes-vous prêt à explorer de nouvelles pistes d’action, à prendre des « risques » ?
  7. Êtes-vous capable de vous engager à être présent à toutes les séances (nombre de séances = nombre de participants + 2), excepté pour motif impérieux imprévisible ?
  8. Êtes-vous prêt à respecter la confidentialité absolue au niveau des personnes, des situations évoquées, des contenus et des comportements au sein du groupe ?

Si vous avez répondu « oui » à ces questions, alors, OUI, le co-développement est pour vous !

Vous l’aurez compris, les maîtres-mots pour participer à un groupe de codéveloppement sont :

  • motivation
  • apprentissage
  • ouverture
  • réflexion
  • attitude d’aide
  • action
  • assiduité
  • confidentialité

Un travail collaboratif adapté à toutes les thématiques ?

Cette façon de « transformer ce que l’on sait déjà », est-elle utile dans toutes les situations ? Le co-développement professionnel convient-il à tout type de thématique ?

Anne Rysenaer :
Ce n’est pas tant la thématique que la composition du groupe et la compétence de l’animateur qui vont assurer le succès d’un groupe de co-développement.

La qualité du travail en groupe présuppose :

  • Un animateur-facilitateur compétent : Chaque séance est cadrée par le processus en 6 étapes, guidé par un animateur-facilitateur extérieur au groupe. Formé au co-développement, il est le garant de la méthode, de la neutralité et la bienveillance au sein du groupe.
  • Des participants :
    • Enclins à réaliser un travail individuel avant (préparation d’une situation-problème), pendant (formulation d’un plan d’actions) et après chaque rencontre (expérimentation).
    • Prêts à explorer de nouvelles pistes d’actions.

Le co-développement et l’EAP

L’EAP s’est lancée dans l’aventure du codéveloppement en 2015 pour soutenir un premier projet pilote au sein du MFWB. Trois groupes de co-développement professionnel et un guide à destination du personnel d’encadrement ont ainsi vu le jour – grâce à cette collaboration – en 2015-2016.

Après évaluation, le MFWB a décidé de poursuivre l’expérience en utilisant le co-développement comme outil de changement organisationnel. Il vise à améliorer les pratiques professionnelles non seulement à travers le développement individuel des participants mais également à travers l’amélioration du fonctionnement de l’organisation et des services. Deux groupes ont été organisés.

Depuis mars 2018, Madame Sylviane WILLO (collaboratrice au sein de la DIDECO)  a été accréditée comme animatrice de groupes de co-développement professionnel. En effet, le MFWB souhaite implémenter des groupes de co-développement à plus large échelle et organiser – en 2019 – de nouveaux groupes prioritairement à l’attention du personnel d’encadrement.

Côté SPW, un projet pilote a été lancé en 2018. Il vise à former 18 personnes issus de toutes les directions générales à la méthode. Notons qu’en Belgique, seule l’académie belge de codéveloppement professionnel est habilitée à accréditer des formateurs. Plusieurs groupes-test seront lancés courant 2019. Ces groupes se réuniront lors de 8 séances de trois heures et lors desquels – vu leur rôle clé – les animateurs nouvellement formés seront supervisés.

De son côté, à l’EAP, Anne Rysenaer – cheffe de projets nouvelles pédagogies – sera certifiée en 2019. L’objectif de l’Ecole – vu le nombre de projets transversaux – sera d’assurer le lien entre les différents groupes de co-développement et d’accompagner la montée en compétences des futurs animateurs internes au sein des administrations.

5 raisons de se former au co-développement

  1. Parce que c’est une méthode, un processus rigoureux, qui soutient l’échange de savoirs pratiques dans le but d’améliorer les pratiques ou les compétences dans un champ professionnel donné (Payette et Champagne, 1997).
  2. Parce que le codéveloppement permet d’être plus efficace dans son travail, chaque participant étant exposé à de nouvelles façons de penser et d’agir.
  3. Parce que le codéveloppement utilise des situations concrètes rencontrées au travail qui visent l’utilisation et le partage des savoirs (pratiques et autres) des praticiens du groupe.
  4. Parce que le concept de l’expérience comme objet de pratiques pédagogiques et de formation « trouve écho dans la valorisation de l’expérience en tant que processus d’apprentissage et de développement autonome de l’apprenant » (Zeitler, Guérin et Barbier, 2012, p.32).
  5. Parce qu’il peut contribuer à briser l’isolement vécu dans certains services / fonctions.

Alors, qu’allez-vous apprendre aujourd’hui ?

Vous pensez que le co-développement serait une bonne approche pour traiter une de vos problématiques ? Contactez Anne Rysenaer pour être conseillé.e. Les nouvelles pédagogies vous intéressent ? Écoutez notre podcast sur l’e-learning et celui sur le thème de la ludopédagogie.

L’École d'administration publique (EAP) a été créée en 2012 pour former le personnel des administrations de la Région Wallonne, la Fédération Wallonie-Bruxelles et leurs OIP. Son objectif est d'améliorer les compétences des collaborateurs, tout en favorisant les échanges d'expériences inter-administrations.

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